Maladie rénale chronique chez le chien

La maladie rénale chronique (MRC) ou insuffisance rénale chronique (IRC) est une perte des fonctions métaboliques, endocriniennes et excrétrices des reins; elle est présente chez 2 à 5 % des chiens.
C’est en général une pathologie de vieux chien. C’est une maladie insidieuse car la perte de fonction rénale prend des mois voire des années. Des mécanismes compensatoires sont mis en place par l’organisme pour palier à la perte de néphrons fonctionnels. Les premiers signes cliniques apparaissent après une perte de 75%.
Les causes de maladie rénale chronique sont diverses, elles peuvent être héréditaires, congénitales ou suite à une maladie (Leptospirose, amyloïdose).

Les signes cliniques de la maladie Rénale Chronique

Lors d’IRC, les néphrons fonctionnels sont remplacés par du tissu cicatriciel et ne peuvent plus remplir leur rôle. Cette perte entraîne une adaptation du reste des néphrons et une compensation pour maintenir l’homéostasie de l’organisme (l’homéostasie est la capacité que peut avoir un système à conserver son équilibre de fonctionnement en dépit des contraintes qui lui sont extérieures).

L’International Renal Interest Society (IRIS) a établit 4 stades d’insuffisance rénale. Ces stades ne sont pas parfaitement bien délimités, mais correspondent à des phases dans le processus dégénératif de la fonction rénale. Elles se basent sur le taux de créatinine plasmatique (Tableau). Ainsi, une prise de sang permet de déterminer à quel stade d’IRC est le chien et de mettre en place le traitement adéquat.

Les conséquences de la maladie rénale sont liées principalement à l’urée. L’urée est dégradée par des bactéries en uréase et ammoniaque qui vont attaquer les tissus.
Il y a une sur-stimulation de la production d’acide par l’estomac car l’élimination de la gastrine (hormone régulatrice de l’acidité stomacale) n’est plus réalisée par les reins ce qui entraîne une stimulation du centre du vomissement au niveau cérébral.
D’autres signes gastro-intestinaux peuvent être observés : stomatite, diarrhée, anorexie, halitose, ulcères et paralysie intestinale.

La perte de fonction rénale va entraîner une hypertension artérielle par une activation du système rénine-angiotensine-aldostérone, une augmentation de la perméabilité capillaire et la formation d’œdème pulmonaire. Cette hypertension artérielle peut avoir d’autres conséquences: décollement rétinien et hypertrophie cardiaque gauche.
L’hématologie du chien atteint de maladie rénale chronique est également modifiée. La fonction des neutrophiles et de la réponse à médiation cellulaire est moindre ce qui va favoriser les infections secondaires. Les plaquettes sont altérées et des troubles de l’hémostase sont observés (pétéchies, ecchymoses, saignement des gencives). Une anémie normochrome normocytaire non régénérative est observée en cas d’IRC.

Les reins sont impliqués dans la régulation de l’équilibre acido-basique de l’organisme, ainsi lors de la maladie rénale chronique une acidose métabolique peut se mettre en place et précipiter les lésions. Le rein ne joue plus son rôle dans l’excrétion du phosphore, ce qui augmente le risque d’hyperparathyroïdie secondaire.

Enfin, une conséquence fréquemment observée est une atteinte du système nerveux central par l’urée. Il y a des altérations diffuses et non spécifiques du cortex cérébral. Les signes nerveux observés sont variés : diminution de la vigilance, léthargie, tremblements, stupeur, troubles du comportements, faiblesses musculaires, ataxie, crampes, crises convulsives et coma.

Diagnostic

Le diagnostic d’IRC est en général posé à un stade avancé de la pathologie. L’animal est souvent vu par le vétérinaire car il vomi, ou a de la diarrhée sanguinolante, est apathique ou ne mange plus. Il urine plus, voire « s’oublie » à l’intérieur. Une prise de sang lui permettra de vérifier la créatinémie, l’urémie et la phosphatémie mais également la numération formule sanguine. Cette prise de sang va non seulement lui permettre de poser un diagnostic, mais également de voir à quel stade de pathologie se trouve le chien (classification IRIS) et d’adapter son traitement et son pronostic en conséquence.
Le diagnostic d’IRC peut être posé plus tôt chez le vieux chien, notamment lors d’une prise de sang de routine. Une augmentation de la créatinine orientera le vétérinaire. Face à une race à risque, proposer une analyse d’urine, et mesurer le ratio protéine/créatinine permettra de vérifier que tout va bien, ou s’il faut surveiller le chien voire le mettre sous alimentation adaptée, ceci avant l’apparition des signes cliniques.

Traitement de la Maladie Rénale Chronique

Les objectifs du traitement de la maladie rénale chronique chez le chien sont :

RALENTIR L’EVOLUTION DE LA MALADIE (et non pas la traiter).

  • prévenir l’anorexie et la perte de poids
  • maintenir la filtration glomérulaire
  • prévenir le développement de l’hyperparathyroïdie secondaire
  • limiter la production des toxines urémiques.
  • gérer les complications (PA, pertes protéiques au niveau urinaire,…)

Le principal traitement en cas d’IRC est l’alimentation. Une bonne alimentation rénale permet d’atteindre ces objectifs.

L’apport protéique doit être restreint pour ne pas augmenter la quantité de déchets azotés mais de très bonne qualité pour ne pas carencer le chien. L’alimentation rénale sera plus riche en lipide, ce qui va favoriser l’apport énergétique mais en diminuant le volume de nourriture et donc diminuer la distension stomacale lors du repas et ainsi le risque de nausées et de vomissements. L’apport en sodium sera normal voire légèrement diminué pour limiter le risque d’hypertension, mais pas supprimé pour éviter tout risque de déséquilibre cellulaire. L’apport en phosphore sera diminué. Les vitamines hydrosolubles sont fortement excrétées par les reins lors de polyurie, leurs quantités seront augmentées.
Le rapport omega3/omega6 doit être équilibré, ainsi que l’apport en vitamines E et C, en taurine et en pigments caroténoïdes. Ils ont un rôle comme antioxydants.
L’apport en fibres doit être suffisant pour aider la motilité intestinale, mais également pour augmenter la biomasse bactérienne et permettre de diminuer l’excrétion rénale en déchets azotés en augmentant l’excrétion fécale.

Le reste du traitement de la maladie rénale chronique a pour but d’éviter les pathologies secondaires.
L’administration d’inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IECA) et d’inhibiteurs calciques va permettre de limiter l’hypertension.
Des chélateurs de phosphores peuvent être ajoutés si la phosphatémie est toujours trop élevée.
Lors d’atteinte du système gastro-intestinal, des anti-vomitifs et des inhibiteurs des pompes à protons peuvent être prescrits pour éviter les nausées. Des pansements intestinaux seront utiles dans le cas de diarrhées.
Enfin, lors d’anémie, l’administration d’androgènes, une transfusion sanguine ou l’administration d’EPO peuvent être envisagées.

Résultats du traitement et pronostic

L’animal en insuffisance rénale chronique est un animal qui doit être suivi et avoir une évaluation régulière de son état (créatinémie, urémie, poids), ainsi l’ajustement du traitement peut être envisagé (figure).
La maladie rénale chronique est une maladie évolutive qui conduit inexorablement à la mort du chien. Le but du traitement est de fournir la meilleure qualité de vie possible au chien.
Le pronostic dépend de la sévérité des signes cliniques et de la concentration sérique en créatinine (Tableau).
En stade IV, la phase du syndrome urémique, le traitement diététique et les médicaments ne suffisent plus, et l’euthanasie est souvent la dernière alternative.

La maladie rénale chronique est une dégénérescence irréversible des néphrons, les signes cliniques apparaissent lorsque trois-quarts de la masse rénale n’est plus fonctionnelle. L’IRC est la troisième cause de décès chez les chiens.
Le dépistage précoce (prise de sang de contrôle) est important et permet de retarder l’apparition des signes cliniques. Un suivi régulier de l’animal permet de vérifier l’observance du traitement, de l’ajuster et éventuellement de traiter d’autres pathologies concomitantes.

Tableau : Classification IRIS des stades de l’IRC chez le chien en fonction de la concentration plasmatique de créatinine

Figure : évolution de l’urémie et de la créatinémie chez un chien atteint de maladie rénale chronique familiale

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