Pour fonctionner correctement et harmonieusement, l’organisme a besoin de fabriquer des hormones grâce à son système endocrinien. Les hormones sont de petites molécules chimiques fabriquées par un organe et agissant sur un autre organe: elles ont un rôle de messager et de régulateur du métabolisme.
Parmi ces hormones, il existe la « cortisone » ou plus précisément le cortisol : il s’agit d’une hormone de la famille des stéroïdes (gluco-corticostéroïdes) fabriquée, à partir du cholestérol, par deux glandes de quelques millimètres situées au dessus des reins : les surrénales. C’est la région externe de ces glandes, le cortex, qui les fabriquent: on parle de glandes corticosurrénales.
La régulation de la sécrétion de cortisol par les glandes surrénales est sous contrôle de deux autres glandes situées au niveau du cerveau : l’hypothalamus et l’antéhypophyse. L’hypothalamus libère une première hormone, la CRH (Corticotropin-Releasing Hormone) qui agit sur l’antéhypophyse pour stimuler la fabrication de pro-opiomélanocortine (POMC) qui deviendra après différentes étapes de maturation, de l’ACTH (adrénocorticotrophine). C’est l’ACTH, produite par l’antéhypophyse qui agit sur les glandes corticosurrénales pour stimuler la libération de cortisol.
L’axe hypothalamus-antéhypophyse-corticosurrénales est appelé « axe corticotrope ».
Le cortisol ainsi fabriqué agit à de nombreux niveaux : le métabolisme glucidique et protéique, la peau, les reins, les os et les ligaments/tendons, le sang, les glandes sexuelles …
Chez le chien, il peut exister un dérèglement de cet axe corticotrope, appelé « hypercorticisme », à l’origine d’une fabrication excessive de cortisol dans l’organisme. On parle également de Maladie de Cushing ou de Syndrome de Cushing lorsque le dérèglement initial affecte respectivement l’antéhypophyse ou les glandes corticosurrénales.
Causes d’hypercorticisme chez le chien
Il existe classiquement deux types d’hypercorticisme (HC): une forme hypophysaire (HCH) dans 80% des cas et une forme surrénalienne dans 20% des cas (HCS).
L’Hypercorticisme hypophysaire se rencontre le plus souvent sur des chiens de petits formats (<15kg) (75% des cas) : il est lié à la présence d’une petite tumeur hypophysaire (microadénome) dans 80% des cas, ou à une tumeur de taille plus importante (>10mm ou macroadénome) dans 20% des cas (exceptionnellement à une hyperplasie hypophysaire non tumorale).
L’Hypercorticisme surrénalien se rencontre, quant à lui, plus fréquemment chez les chiens de grands formats (> 20kg) : il est secondaire à un adénome (tumeur bénigne) dans 40% des cas ou un adénocarcinome (tumeur maligne) dans 60% des cas. La tumeur n’atteint qu’une seule glande corticosurrénale.
En général, les chiens atteints ont environ 10 ans.
Il existe un hypercorticisme « iatrogène » qui est lié à une administration externe chronique de « cortisone » : cette situation se rencontre classiquement lorsque un chien est traité par exemple pour des problèmes dermatologiques (démangeaisons, allergies,…) ou une maladie auto-immune (anémie, polyarthrite, méningite,…) avec administrations répétées de « cortisone ».
Symptômes
Très fréquents
- Polyuro-polydipsie (volume des mictions urinaires et prise de boisson augmentés)
- Polyphagie (appétit augmenté)
- Distension de la sangle abdominale (ventre dilaté)
- Symptômes cutanés : alopécie (perte de poils) du tronc symétrique et non prurigineuse, peau fine et moins élastique, comédons (« points noirs »).
Moins fréquents
- Symptômes cutanés : télangiectasie (dilatation de petits vaisseaux cutanés), retard de pousse des poils, calcinose (apparition de petites masses calcifiées dans les tissus), séborrhée sèche, surinfection cutanée.
- Troubles urinaires : infections urinaires répétées, calculs urinaires
- Symptômes neuromusculaires : faiblesse et atrophie musculaire, intolérance à l’effort, laxité ligamentaire (rupture de ligament croisé), pseudomyotonie des membres postérieurs (raideur), troubles nerveux
- Symptômes respiratoires : essoufflement, ronflements, détresse brutale (thromboembolie pulmonaire)
- Troubles de la reproduction : absence de chaleurs chez la femelle, féminisation chez le mâle
Diagnostic
La démarche diagnostique pour s’orienter vers un hypercorticisme se fait en trois étapes.
- Rechercher des modifications sanguines et urinaires rencontrées fréquemment lors de cette maladie : une analyse sanguine biochimique et hématologique et un prélèvement urinaire sont nécessaires.
- Confirmer ou infirmer un hypercorticisme
Lors de suspicion clinique faible, le vétérinaire peut réaliser, à partir d’urines du matin prélevées par vos soins, un rapport cortisol/créatinine urinaire (RCCU). Ce test, s’il s’avère négatif, permet d’exclure un HC de façon quasi certaine. S’il est positif, aucune conclusion n’est possible.
Lors de suspicion clinique plus forte, le vétérinaire peut réaliser deux types de tests sanguins qui sont des stimulations hormonales : une stimulation à l’ACTH ou une freination faible à la dexaméthasone. Parfois ces tests doivent être répétés pour confirmer un HC. - Localiser le site de l’hypercorticisme.
Afin de savoir où se situe le dérèglement (antéhypophyse ou surrénale), plusieurs moyens diagnostiques sont possibles : des examens d’imagerie (échographie abdominale et/ou scanner de l’encéphale et de l’abdomen) ou des examens sanguins (freination forte à la dexaméthasone ou dosage de l’ACTH endogène).
Lorsqu’une tumeur surrénalienne est mise en évidence, il est conseillé de vérifier la présence de métastases locorégionales ou à distance par des examens d’imagerie (scanner > échographie).
Traitement de l’hypercorticisme chez le chien
Lors d’hypercorticisme hypophysaire, bien que des interventions chirurgicales –hypophysectomies – existent (nombreuses complications), les traitements possibles sont la radiothérapie et un traitement médical.
Lors d’hypercorticisme surrénalien, le traitement de choix reste la chirurgie lorsque la tumeur n’a pas métastasé et que la croissance locale reste modérée. Dans ce cas, un traitement médical devra être mis en place pour stabiliser l’animal avant l’intervention. Cette prise en charge médicale reste par ailleurs possible dans tous les cas d’hypercorticisme surrénalien non opéré ou non opérable.
En fonction de l’état général de l’animal, du contexte médical et financier, de l’efficacité et des effets secondaires des médicaments et du protocole de suivi, le vétérinaire peut adapter le traitement.
À l’exception d’une intervention chirurgicale (éventuellement de la radiothérapie) qui permet de « guérir » l’animal, le traitement médical permet d’obtenir une résolution des symptômes et l’obtention d’une bonne qualité de vie de l’animal mais en aucun cas une disparition de la tumeur.
Suivi et pronostic
Quelle que soit la décision thérapeutique, un suivi étroit de l’animal, à la fois sur le plan clinique que biologique (prises de sang et examens urinaires réguliers), est indispensable de façon, notamment, à adapter les posologies des médicaments.
Le traitement médical, une fois mis en place, est nécessaire à vie.
Tout effet secondaire (abattement, anorexie, vomissements, diarrhée, tremblements,…) nécessite l’arrêt du traitement et une consultation de contrôle chez le vétérinaire.